École 2.0 : Après les logiciels éducatifs, les robots enseignants ?

L’école 2.0 – tablettes, tableaux interactifs, MOOCs, logiciels et jeux éducatifs : le numérique investit de plus en plus les bancs des écoles européennes. Certains placent beaucoup d’espoir dans les nouvelles technologies. Elles pourraient offrir un suivi plus personnalisé aux élèves. Ou encore améliorer de manière significative les résultats scolaires dans un cadre ludique. D’autres s’inquiètent de la surexposition des enfants aux écrans. Elle aurait des conséquences sur le langage, le développement psychomoteur ou l’empathie.

École 2.0 : ampoule dans une bulle de pensée pour évoquer une idée

Mais les détracteurs de l’école 2.0 doivent se demander si l’éducation peut se permettre aujourd’hui de faire l’impasse sur le numérique, alors que les métiers de demain s’engagent majoritairement dans cette voie ? Quant à ses fervents défenseurs, sont-ils certains des effets bénéfiques de ces nouveaux outils pédagogiques sur les enfants ?

Quelle orientation pour les écoles européennes à l’heure de la révolution numérique ?

D’ici quelques années, les avancées technologiques et l’intelligence artificielle risquent de faire disparaître des millions d’emplois. Pour permettre aux enfants de s’adapter à cette mutation de la société, il semble essentiel de les former aux outils de demain. Il faudrait investir directement dans les salles de classes. Mais le taux d’équipement numérique et l’acquisition des compétences numériques sont encore inégalement répartis en Europe.

Les pays nordiques et scandinaves disposent actuellement du meilleur taux d’équipement à tous les niveaux. Côté français, les écoles sont entrées dans le mouvement mais très tardivement. Le plan numérique lancé par Francois Hollande en 2015 prévoyait d’équiper l’intégralité des collégiens de tablettes d’ici 2018. Aujourd’hui les objectifs ne sont pas atteints et les écoles primaires sont encore moins bien équipées que les écoles secondaires. Or, faire des enfants des « analphabètes du numérique » est un véritable danger pour l’Europe de demain.

Il est également important d’adapter le contenu des cours à la société de demain. À Issy les Moulineaux, des élèves de CM2 se rendent deux fois par mois dans une classe expérimentale de Microsoft. C’est une classe futuriste totalement interactive et numérique. Les écrans revêtent les tables, les murs, et même le sol. Le géant numérique revoit le programme scolaire traditionnel en dispensant des cours sur le code informatique ou encore la programmation de mini robots.École 2.0 : robot

Mais des ombres au tableau…

Même si l’école numérique permet d’être plus en phase avec le quotidien des élèves du XXIème siècle et de les aider à discerner le vrai du faux dans cette multitude d’informations médiatiques, certains se cramponnent encore à l’idée d’une école non numérique, plus « humaine » à leurs yeux. Une étude menée par une université du Michigan, aux États-Unis, démontre que les collégiens américains sont moins empathiques (de 40% environ) que ceux des années 1980-1990, et certains des chercheurs attribuent ce résultat à la surexposition des élèves aux écrans.

C’est aussi l’avis des écoles Steiner-Waldorf, implantées un peu partout en Europe. Celles-ci préfèrent éviter tout contact avec les nouvelles technologies et placer la création artistique (dessins, pratiques musicales, et théâtre) au centre de leur pédagogie. Les tablettes et les ordinateurs sont interdits en classe jusqu’au lycée. Pour eux, c’est la créativité et l’empathie qui permettront aux futurs adultes de demain de mieux s’adapter aux profondes mutations de la société. Elles leur assureront un avenir et leurs permettront de ne pas se faire remplacer par des machines.

Bonnet d’âne pour les élèves français : les logiciels d’apprentissage comme solution ?

D’après la dernière enquête Pirls (Programme international de recherche en lecture scolaire), les performances des élèves français de CM1 en compréhension de l’écrit étaient parmi les plus mauvaises en Europe. Des équipes de chercheurs développent aujourd’hui des applications sur tablettes pour améliorer l’apprentissage de ces fondamentaux chez les enfants ou influer directement sur leur vitesse et leur facilité d’apprentissage.

Des logiciels renforçant les « piliers cognitifs de l’apprentissage »

À Caen depuis 2016, une équipe de professeurs expérimente sur leurs élèves des logiciels éducatifs basés sur les neurosciences. Notamment le jeu Stroop : l’enfant doit sélectionner la couleur de l’encre dans lequel le mot est écrit, alors que le mot lui-même désigne une couleur différente (par exemple, le mot jaune écrit en bleu). Ce jeu est censé stimuler la mémoire de travail des enfants.

Le “serious game“ ELAN, un jeu d’apprentissage de la lecture, est testé dans des classes de CP à Poitiers depuis septembre 2016. Plongé dans un environnement ludique, l’enfant va entendre plusieurs phonèmes et devoir choisir les graphème correspondants de manière répétitive au cours du jeu. D’après les chercheurs, le support du jeu vidéo déclencherait chez les enfants des mécanismes d’apprentissage fondamentaux tels que la concentration, l’engagement dans l’action, la correction de nos erreurs, et l’automatisation des réponses.

Des logiciels adaptatifs : L’adaptative learning

L’entreprise française Domoscio a récemment développé un logiciel éducatif capable de s’adapter au profil des élèves. À chaque exercice, le logiciel étudie les réponses de l’élève, ses erreurs et même son temps d’hésitation. Il pourra par la suite lui proposer un parcours d’apprentissage plus adapté à son niveau et à son mode de raisonnement. Cette méthode est déjà employée depuis plusieurs années aux E-U, notamment par la startup éducative Altschool, un réseau de micro-écoles, crée par un ancien cadre de Google en 2013, où les cours sont organisés sous forme de playlists adaptatives.

Des premiers résultats mitigés pour l’école 2.0 :

La Khan Academy, pionnière des MOOCs (« cours en lignes gratuits et ouverts à tous ») pensait révolutionner le domaine pédagogique en lançant sa plateforme éducative en 2006. Une révolution tuée dans l’oeuf : près de 90% des inscrits abandonnent et ne vont pas au bout de leurs playlists éducatives. Face au virtuel, les élèves finissent par se sentir isolés, en manque d’interaction humaine.

Une récente enquête PISA de l’OCDE vient également noircir le tableau de l’école 2.0. Cette enquête a étudié les liens entre l’intensité d’utilisation des nouvelles technologies dans les classes et les performances scolaires. Le bilan s’avère plutôt négatif : plus les écrans sont utilisés, moins les élèves réussissent.
Enfin, les logiciels d’apprentissage ne montrent pas encore de progrès majeurs quant aux performances cognitives et aux résultats scolaires des enfants.

Mais l’école 2.0 n’est encore qu’à ses débuts. Avec les avancées de la neuroscience, il s’agira de définir quels types d’apprentissages se portent le mieux au numérique, au présentiel, à l’interaction, afin de réajuster l’école 2.0 et la rendre plus performante. Comme l’école finlandaise, souvent dans les premiers de la classe au classement scolaire PISA de l’OCDE, il s’agira de trouver le juste milieu entre ateliers créatifs et ateliers numériques, entre interactions artificielles et interactions humaines, entre technologie et empathie.

Vers les robots enseignants ?

Le métier d’enseignant ne nécessite pas seulement des connaissances mais aussi de l’empathie. C’est pourquoi, on a longtemps cru que ce métier serait épargné par le développement de l’intelligence artificielle. Mais aujourd’hui, certains experts en éducation, pensent que les professeurs seront remplacés par des robots enseignants d’ici une dizaine d’années afin d’offrir une éducation plus performante et adaptative aux enfants. À Tokyo, une école élémentaire a ainsi testé le premier robot enseignant au monde : Saya.

Envie d’en apprendre plus ? Découvrez notre article sur le futur de l’intelligence artificielle.

Rédigé par Mélanie GREJOIS

Sources (cliquez ici !)

Sources :
https://www.arte.tv/fr/videos/075778-002-A/demain-l-ecole-1-2/
https://www.arte.tv/fr/videos/075778-001-A/demain-l-ecole-2-2/
https://www.sudouest.fr/2017/11/28/tablettes-numeriques-a-l-ecole-une-fausse-bonne-idee-3987166-4699.php
http://elanpourlalecture.fr/a-propos/
https://www.zdnet.fr/actualites/tablettes-a-l-ecole-le-gouvernement-veut-passer-au-byod-39872677.html
https://www.challenges.fr/monde/europe/l-ecole-finlandaise-un-modele-d-education-dont-pourrait-s-inspirer-la-france_442246
https://www.lepoint.fr/societe/education-les-vertus-de-l-ecole-2-0-07-03-2016-2023468_23.php
http://penseeartificielle.fr/robot-professeur-autonome-10-ans/